Cancers de la thyroïde : Tchernobyl n'explique pas tout

La dernière étude du Bulletin épidémiologique hebdomadaire (Beh) remarque que l’accident de la centrale nucléaire de Tchernobyl, en 1986, a une incidence faible sur l’augmentation des tumeurs de la thyroïde.

En France, l’incidence des cancers papillaires de la thyroïde [fn]Le cancer papillaire de la thyroïde est le cancer le plus courant de la thyroïde. Il représente environ 70 % de tous les cancers de la thyroïde.[/fn] a fortement augmenté au cours de la période 1982-2012, avec un taux annuel moyen d’augmentation dépassant les 6 %, remarque le Beh dans sa dernière étude. L’augmentation se ralentit au cours de la période récente pour les personnes de moins de 60 ans au moment du diagnostic et persiste seulement au-delà de cet âge.

D’où vient cette augmentation ?

« Bien que l’accident de Tchernobyl se soit produit il y a maintenant trente ans, l’idée selon laquelle ses retombées radioactives seraient en partie responsables de l’accroissement de ce type de cancer en France, en l’occurrence très éloignée des territoires fortement contaminés (Biélorussie, Ukraine et Russie), reste solidement ancrée dans de nombreux esprits », mais l’analyse descriptive de l’incidence du cancer de la thyroïde à partir des données dans les différents départements montre qu’il n’y a pas plus de cancers dans les régions situées à l’Est de la France. En effet, les chercheurs ont noté une forte incidence en Isère, mais aussi en Gironde et en Vendée alors qu’elle est faible dans le Bas-Rhin, le Haut-Rhin et la Manche.

Pour eux, cette augmentation résulte en grande partie d’un effet des pratiques médicales et l’amélioration des techniques diagnostiques. L’ augmentation de l’utilisation de l’échographie lors de la prise en charge diagnostique des pathologies de la thyroïde, combinée à l’amélioration de ses performances, a permis la détection de lésions de plus en plus petites, de stade précoce dont la plupart ne provoqueront jamais de symptômes.

La glande thyroïde est de plus en plus surveillée, « notamment lors d’examens réalisés au niveau de la région cervicale pour d’autres indications ».

« L’exposition aux rayonnements ionisants durant l’enfance, qu’ils soient externes (rayons X ou gamma) ou internes (dus à des particules d’iode-131, relargués dans l’atmosphère lors d’accidents ou d’essais nucléaires, qui sont inhalées ou ingérées), reste aujourd’hui le principal facteur de risque connu de ce cancer », précise l’étude.

En effet, la thyroïde a pour particularité de concentrer l’iode et d’être exposée à des doses plus élevées que celles retrouvées dans le reste de l’organisme. Par sa localisation superficielle, la thyroïde est aussi potentiellement davantage irradiée par des rayons externes que d’autres organes. Les examens médicaux et dentaires ont beaucoup augmenté l’exposition de la thyroïde aux rayons X, principalement les examens au scanner.

En 2015, en France, on estime le nombre de nouveaux cas de cancer de la thyroïde à 2 783 chez les hommes et 7 317 chez les femme. 143 hommes et 215 femmes en sont décédés. Son incidence est plus élevée chez les femmes que chez les hommes, surtout entre 30 et 50-60 ans.

Dans le monde, l’incidence a également beaucoup augmenté ces dernières décennies dans la plupart des pays, alors que la mortalité a progressivement baissé

Pris à temps, le cancer de la thyroïde est un cancer de bon pronostic.