Le Trésor veut taxer la malbouffe

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La Direction générale du trésor a publié une étude sur les conséquences de l’obésité pour l’économie. Elle propose de nouvelles pistes. En particulier une taxe unique sur la malbouffe.

Alors qu’elles représentent un peu moins de la moitié de la population, les personnes obèses ou en surpoids contribuent à une part plus élevée des dépenses de santé (56 % pour les soins de ville et probablement davantage à l’hôpital). L’excès de poids entraîne en effet des conséquences sanitaires particulièrement néfastes : à la fois sur la morbidité, en accroissant le risque de contracter une maladie chronique, et sur la mortalité (13 % des décès en Europe étaient imputables à l’obésité en 2002). L’obésité reflète également d’importantes inégalités sociales, puisqu’elle est surreprésentée dans les ménages modestes. Le coût social de la surcharge pondérale avoisinait 20 milliards d’euros (1 % du Pib) en 2012 soit un montant comparable à celui de l’alcool et du tabac.

Toutefois, le coût par individu concerné est largement inférieur à celui par personne alcoolique ou par fumeur, puisque bien plus d’individus sont concernés par la surcharge pondérale. De plus, les comportements individuels ne doivent être stigmatisés puisque, contrairement à l’alcool et au tabac qui dépendent des comportements individuels, les causes de l’obésité sont multiples (qualité des aliments consommés, déterminants génétiques etc.). Si des mesures pertinentes ont déjà été mises en œuvre pour tenter de contenir la hausse du nombre de personnes en excès de poids, elles peuvent encore sembler insuffisantes face aux risques sanitaires encourus et notamment l’augmentation prévisionnelle du nombre de personnes obèses et en surpoids (33,0 millions en 2030 contre 24,6 en 2012). Les mesures de prévention passées ont principalement mis l’accent sur les campagnes d’information de masse. Il semble possible de renforcer les incitations pour les médecins à développer la prévention et d’améliorer l’efficacité des taxes nutritionnelles pour qu’elles infléchissent de manière plus marquée les comportements.

S’il semble souhaitable d’agir sur la fiscalité comportementale afin d’améliorer les politiques de lutte contre l’obésité en France, d’autres types de mesures non coûteuses et innovantes pourraient être encouragées pour lutter contre l’excès de poids qu’il s’agisse :

  • d’exploiter les incitations inconscientes à la prise de décisions des consommateurs afin de rendre l’alimentation plus saine ;

  • de réaliser des campagnes de prévention plus ciblées ; 

  • de limiter, voire d’interdire, des publicités destinées aux enfants vantant des produits dont l’excès de consommation peut nuire à la santé ; 

  • de renforcer l’étiquetage nutritionnel.

L’organisation d’un suivi intensif des personnes obèses par des professionnels de santé semble enfin très prometteuse mais potentiellement coûteuse à court terme. Deux éléments rendent difficile ce suivi : le manque d’incitations pour les médecins et le manque de moyens dans certaines régions sous-dotées en médecins.

En matière de prévention, la Direction générale du Trésor propose de développer un paiement à l’activité de prévention. Il pourrait prenrde la forme d’un forfait attribué par patient ayant un fort Imc (similaire au forfait de 40 € par patient atteint d’une Ald que reçoivent leurs médecins traitants). Les expérimentations de la prescription par le médecin traitant de consultations diététiques ou psychologiques pour les jeunes souffrant de surcharge pondérale, permises par la Lfss 2016, semblent être intéressantes et méritent d’être encouragées, signale l’étude.

« Si cette solution simple à mettre en œuvre crée de nouvelles incitations, les coûts induits pourraient s’avérer importants pour la sphère publique. Elle ne réglerait pas non plus les problèmes liés à l’emploi du temps très chargé des médecins. »

Concernant la publicité, la Dst propose une interdiction de diffuser tout spot publicitaire à destination des enfants, couplée à des sanctions financières en cas de non-respect. 

Enfin, la Dst préconise la mise en place d’une taxe unique sur la malbouffe en fonction du niveau des calories. Si l’idée est excellente en matière de santé publique, elle est compliquée socialement car on sait que les taxes nutritionnelles sont régressives par nature puisque l’alimentation représente une part plus importante du budget des ménages les plus modestes et que ces ménages consomment davantage de produits néfastes pour la santé. Toutefois, propose la Dst, rien n’empêcherait d’adjoindre à cette taxation une mesure de redistribution (éventuellement une prestation attribuée sous condition de ressources) visant à restaurer le pouvoir d’achat des ménages les plus modestes.